L’odds ratio ou rapport des cotes

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1       Définition

1.1      Odds

L’odds ratio (dont une traduction littérale en français peut être « rapport des cotes ») est le rapport de l’odds de l’événement (sa cote, il s’agit de la cote des parieurs, comme par exemple la cote d’un cheval) dans le groupe traité divisé par l’odds de l’événement dans le groupe contrôle. L’odds est égale à c = r /(1 – r)r est la fréquence de l’événement. Ainsi un odds est le rapport du nombre de patients présentant l’événement, r×n, divisé par le nombre de patients ne présentant pas l’événement, (1-r)×n. Par exemple, un odds de 0,25 correspond au rapport 2/8 et signifie que pour 2 patients présentant l’événement, 8 ne le présentent pas (0,25=2/8=r/(1-r) ). Dans la même situation, le risque est 0,20 (2/10).

Un odds peut aussi être interprétée de la façon suivante : dans un groupe, pour 100 patients ne présentant pas l’événement étudié, 100*c le présentent.

1.2      L’odds ratio

L’odds ratio s’obtient par

c1 et c0 sont respectivement les odds dans le groupe traité et dans le groupe contrôle.

Avec l’exemple précédent :

L’odds ratio peut être aussi exprimé en réduction relative des odds (« relative change in odds ») obtenu par : . Ainsi avec l’exemple, RRO = (1-0,49)´100% = 51%.

En épidémiologie, l’odds ratio est utilisé avec les études cas-témoin pour appréhender le risque relatif qui ne peut pas être calculé directement. En effet, dans ces études, les nombres de cas et de témoins sont fixés par l’investigateur « sans que l’on connaisse la population dont-ils sont issues ». On ne peut pas le risque, et par conséquent le risque relatif, car on ne connaît pas le dénominateur. Dans certaines publications, le terme risque relatif est d’ailleurs improprement utilisé pour présenter les résultats obtenus avec un odds ratio.

L’odds ratio est assez peu utilisé dans l’essai thérapeutique. Par contre il est fréquent en méta-analyse (Figure 3).

Figure 3 – Exemple de résultats rapportés sous la forme d’odds ratio dans une méta-analyse.

1       Interprétation

L’odds ratio s’interprète de façon similaire au risque relatif (nous allons d’ailleurs voir que l’odds ratio est proche du risque relatif). Un odds ratio de 1 correspond à l’absence d’effet. En cas d’effet bénéfique, l’odds ratio est inférieur à 1 et il est supérieur à 1 en cas d’effet délétère. Plus l’odds ratio est éloigné de 1, plus l’effet est important.

 

Comparaison mathématique du risque relatif et de l’odds ratio

L’odds ratio peut aussi se calculer directement à partir de la table de contingence. En considérant les notations suivantes :

 

 

l’odds ratio se calcule par :

 

tandis que le risque relatif est :

 

Ainsi quand la fréquence de l’événement est faible, c’est-à-dire quand A est petit comparé à B et C petit par rapport à D, C+D est assimilable à D et A+B à B. La formule du risque relatif devient alors similaire à celle de l’odds ratio.

2        Relation entre l’odds ratio et le risque relatif

L’odds ratio est une estimation du risque relatif lorsque la fréquence de l’événement est faible.

Sur un même jeu de données, l’odds ratio est en général assez proche du risque relatif. Ainsi avec notre exemple, OR=0,49 et RR=0,53.

L’odds ratio est d’autant plus proche du risque relatif que le risque de base dans le groupe contrôle est faible. Le tableau 3 compare la valeur des risques relatifs et des odds ratio calculés à partir des mêmes données, dans différentes situations où le risque de base est plus ou moins grand. La

figure 4 représente graphiquement cette évolution de l’odds ratio en fonction du risque de base.

Tableau 3. Relation entre l’odds ratio (OR) et le risque de base (R0) dans une situation ou le risque relatif (RR) est constant et égal à 0,8.

 

Figure 4 – Évolution de l’odds ratio en fonction du risque de base pour un risque relatif constant de 0,8.

Quand le risque de base est faible, l’odds ratio est donc une bonne approximation du risque relatif. À l’inverse, l’odds ratio tend vers zéro quand le risque de base est très important (voisin de 1) quelle que soit la valeur du risque relatif.

En termes, d’efficacité d’un traitement, l’odds ratio aura tendance à surestimer l’effet du traitement quand le risque de base est élevé (au dessus de 25% environ). Dans ce cas, les résultats présentés avec un odds ratio seront plus favorables au traitement que ceux basés sur le risque relatif et un odds ratio ne peut plus être interprété comme un risque relatif. L’odds ratio ne peut plus être utilisé pour estimer la réduction relative des risques ; et il doit être interprété en termes de réduction des odds, qui est plus importante que la réduction des risques. Par exemple, avec les données de la dernière ligne du tableau 3, l’odds ratio de 0,71 ne doit pas être interprété comme une réduction du risque de 29% puisque celle-ci n’est que de 20% par construction, mais bien comme une réduction relative des odds de 29%. Dans ce cas, l’effet du traitement exprimé en réduction des odds semble plus important que lorsqu’il est exprimé en réduction de risque.

Bien que l’odds ratio soit quelque peu décrié à l’heure actuelle comme mesure de l’effet d’un traitement 1,2, il présente néanmoins différents intérêts (cf. § 9. L’odds ratio est aussi l’indice naturel de paramètrisation d’une table 2x2. De ce fait, il intervient dans de nombreuses méthodes de calculs statistiques (régression logistique).

Calcul de l’intervalle de confiance de l’odds ratio

Comme pour le risque relatif, le calcul de l’intervalle de confiance de l’odds ratio se fait par l’intermédiaire de l’intervalle de confiance de son logarithme, car le logarithme (logarithme népérien) de l’odds ratio est distribué selon une loi normale et il est possible d’approcher sa variance.

La variance du logarithme de l’odds ratio est :

Les bornes inférieure (bi) et supérieure (bs) de l’intervalle de confiance à 95% du logarithme de l’odds ratio sont obtenues par :

Les bornes de l’intervalle de confiance à 95% de l’odds ratio s’obtiennent alors par :

 et

 

Surestimation de l’effet traitement par l’odds ratio. Exemple des unités de soins intensifs pour AVC

Une méta-analyse réalisée par le Cochrane Stroke Review Group 3 a évalué l'efficacité en terme de mortalité totale ou de dépendance à la fin de la période de suivi de la prise en charge en unités neuro-vasculaires spécialisées des patients ayant présenté un accident vasculaire cérébral constitué ou transitoire, quelle qu’en soit l'ancienneté.

Cette méta-analyse conclu à un bénéfice important apporté par les unités de soins intensifs sur le risque de mortalité totale ou de dépendance, caractérisé par un odds ratio de 0,75 IC95%=[0,65 ;0,87]. Cet odds ratio ne doit cependant pas être interprété comme une réduction relative du risque de 25% car le risque de base varie entre 39,1 % et 92,3 % en fonction des essais. Ce résultat se situe donc dans une zone de risque de base où l’odds ratio sous-estime fortement le risque relatif. En refaisant les calculs de la méta-analyse directement avec le risque relatif on obtient RR=0,90 IC95%=[0,85 ;0,95], résultat toujours en faveur d’un effet du traitement mais qui apparaît alors moins important (réduction relative du risque de 10%). Dans cet exemple, l’odds ratio traduit la réduction relative des odds apporté par le traitement mais ne permet pas d’estimer la réduction relative de risque. Interpréter l’odds ratio comme un risque relatif revient à surestimer fortement (de 15%) le bénéfice de l’intervention : réduction relative de risque de 25% à la place de 10%.

3       Avantages et inconvénients du risque relatif par rapport à l’odds ratio

Le risque relatif est la mesure préférentielle du bénéfice relatif apporté par un traitement. Il présente cependant certaines limites.

Deux indices mesurent le bénéfice relatif. Sont-ils cependant identiques ? En pratique, le risque relatif est préféré à l’odds ratio car :

·          il est d’interprétation intuitive,

·          c’est un indice qui vient naturellement à l’esprit pour mesurer l’effet d’un traitement,

·          il donne une valeur similaire à celle de l’odds ratio car dans une grande majorité des situations le risque de base est peu important.

Cependant, le risque relatif présente certaines limites. Il ne peut pas prendre la même plage de valeur en fonction du risque de base. Imaginons, que dans une population où la fréquence de base de l’événement est de 0,2, un traitement délétère entraîne un risque relatif de 4 conduisant à une fréquence sous traitement de 0,8. La mesure de l’effet de ce même traitement dans une population où la fréquence de base est supérieure à 0,25 aurait forcément conduit à un risque relatif plus petit. En effet au-dessus de r0>0,25, le produit r0 rr qui est la fréquence sous traitement r1 est supérieur à 1 ce qui est une valeur impossible. Pour un risque de base r0=0,3, le risque relatif maximum qui correspond à un risque sous traitement de r1=1 est de 1/0,3 = 3,33 inférieur à 4. Ainsi, le risque relatif ne peut pas être considéré comme étant une caractéristique universelle d’un effet traitement étant donné que sa valeur est contrainte en partie par le risque de base de la population dans laquelle est étudié l’effet. L’odds ratio (cf. infra) ne présente pas cet inconvénient. Une même valeur d’odds ratio est compatible avec tous les risques de base.

L’autre limite de cet indice provient de son asymétrie. Le risque relatif n’est pas symétrique dans l’opposition présence / absence de l’événement. Si un traitement entraîne une réduction relative du risque de 20% sur la mortalité il n’entraîne, par exemple pour un risque de base de 10%., qu’une augmentation de 2% de la survie. La survie est pourtant symétrique à la mortalité : une réduction de mortalité entraîne une augmentation de la survie, mais les tailles d’effet ne sont pas conservées. Si la fréquence de présence de l’événement est r1 dans le groupe traité et r0 dans le groupe contrôle, la fréquence de l’absence de l’événement est respectivement dans ces deux groupes 1-r1 et 1-r0. Le risque relatif rattaché à l’absence d’événement n’est pas l’inverse de celui rattaché à la présence de l’événement.

Avec l’exemple initial, la fréquence de l’absence de l’événement est de 1-8%=92% dans le groupe traité et de 1-15%=85% dans le groupe contrôle. Nous avons vu que le traitement entraîne une réduction relative de 47% de la fréquence de l’événement. Par contre le traitement n’augmente que de 8% la fréquence des patients exempts de l’événement ((1-0,92 / 0,85)*100%) et non pas de 47%. Le traitement pourrait paraître moins efficace avec le critère de jugement de prévention de l’événement par rapport au critère d’échec du traitement. Il s’agit pourtant des deux façons symétriques de voir le problème. L’odds ratio ne présente pas cet inconvénient.

4       Bibliographie

1. Sackett DL, Deeks JJ, Altman DG. Down with the odds ratio! Evidence Based Medicine 1996;1:164-6.

2. Bland JM, Altman DG. The odds ratio. BMJ 2000;320:1468.

3. Organised inpatient (stroke unit) care for stroke. Stroke Unit Trialists' Collaboration. Cochrane Database Syst Rev 2000(2):CD000197.

 

 

 

 

 

Interprétation des essais cliniques pour la pratique médicale

www.spc.univ-lyon1.fr/polycop

Michel Cucherat

Faculté de Médecine Lyon - Laennec

Mis à jour : aout 2009