Comparaison des différents indices, Bénéfice relatif — bénéfice absolu

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L’efficacité d’un traitement est envisageable suivant deux axes : le bénéfice relatif et le bénéfice absolu

Les différents indices d’efficacité que nous venons de voir, risque relatif, odds-ratio, différence des risques, et nombre de sujets qu’il faut traiter pour éviter un événement (NNT), ne véhiculent pas exactement la même information clinique. Ainsi, ces mesures ne donnent pas exactement les mêmes renseignements sur la pertinence clinique d’un effet. Les deux premières (odds ratio, risque relatif) sont des mesures relatives et estiment un bénéfice relatif, tandis que les deux dernières (différence des risques et NNT) mesurent un bénéfice absolu.

Le bénéfice relatif est plutôt une information explicative. Il est le reflet direct de l'efficacité du traitement. Il est en général constant d'une population à l'autre et sa valeur caractérise le traitement pour un large éventail de situations. C'est une information qui intéresse le chercheur. C’est aussi un indice qui permet de comparer différents traitements de la même maladie. En cela il intéresse le prescripteur et le décideur de santé publique.

Le bénéfice absolu reflète plus les conséquences apportées par un traitement au niveau d'une population. Il est spécifique d'une situation particulière : traitement caractérisé par son risque relatif, type de patients conditionnant le niveau de risque de base, durée de traitement ou de suivi. Il est plus pertinent en termes de santé publique.

Tableau 7 – Comparaison du bénéfice relatif et du bénéfice absolu

Bénéfice relatif

Bénéfice absolu

(risque relatif, odds ratio)

(différence des risques, NNT)

indice explicatif

indice caractéristique du traitement

intéresse le chercheur

intéresse le médecin et le décideur de santé publique pour apprécier le bénéfice absolu

indice pragmatique

indice caractéristique d'une situation (traitement, patient, durée)

reflète l'importance du bénéfice par rapport au risque de base

intéresse le médecin et le décideur de santé publique

Une réduction relative de risque de 30% est déjà une réduction conséquente, qui, d’ailleurs, n’est que rarement observée. Malgré cela, la pertinence clinique de cet effet dépend du risque de base. En effet, réduire en relatif de 30% un événement fréquent est bien plus intéressant que de réduire dans la même proportion un événement rare. Si le risque de base est de 50%, sous l’effet d’une réduction de 30%, il devient 35%, donnant une différence de risque de 15%. Avec un risque initial de 5%, la même réduction relative aboutit à un risque sous traitement de 3,5%, correspondant à une différence absolue de 1,5%. En termes d’événements évités pour 1000 sujets traités, le premier cas de figure correspond à 150 événements évités, tandis que le second à seulement 15. Aussi bien du point de vue de la santé publique, que du point de vue individuel, la première situation est plus intéressante que la seconde.

En pratique, l’intensité de l’efficacité d’un traitement est quantifiée par le risque relatif car le risque relatif se révèle relativement constant d’une situation clinique à une autre 1, il caractérise le traitement comme une sorte de « constante universelle ». Cependant, ce risque relatif ne permet pas de juger directement de la pertinence clinique de l’utilisation de ce traitement sans une situation clinique particulière. En effet, cette pertinence clinique va dépendre du bénéfice absolu apporté par le traitement dans cette situation et qui dépend du risque relatif et du risque de base. Ainsi, en fonction du niveau de risque des patients, un même traitement pourra apporter un bénéfice plus où moins intéressant. En règle générale, le traitement de patients à très bas risque n’a que peu d’intérêt pour la collectivité comme pour le patient.

1       Guide d’appréciation du bénéfice apporté par un traitement

D’une manière générale, pour apprécier le bénéfice apporté par un traitement, il va être nécessaire de vérifier que le risque relatif est constant à travers les essais (aux fluctuations d’échantillonnages près) puis d’estimer ce risque relatif. Ceci est effectué par la méta-analyse en utilisant les outils de recherche de l’hétérogénéité et l’estimation du risque relatif commun.

Ensuite le bénéfice absolu apporté par ce traitement est estimé pour un ou plusieurs risques de bases correspondant aux patients plus ou moins à risque de la population cible. La détermination de la valeur du risque de base peut s’effectuer à partir des groupes contrôles (placebo) des essais. La plage de variation des risques de base est déterminée, puis le risque moyen ou médian. Dans les situations où les niveaux de risque des patients sont plus ou moins élevés entre les essais, il est alors possible de déterminer la valeur de risque caractérisant le mieux les patients à faible risque, à risque moyen et à haut risque, conduisant à la détermination de trois valeurs de bénéfice absolu. Les études épidémiologiques sont aussi utilisables pour cerner le risque de bases.

Pour les essais contre traitement actif, le risque de base a utilisé est celui qui est obtenu avec ce traitement. Le calcul donne le surcroît de bénéfice absolu apporté par le nouveau traitement vis-à-vis du précédent.

2       Influence de la présentation des résultats sur la perception de l’intensité de l’efficacité

Plusieurs études ont montré que le choix de l’indice utilisé pour rapporter les résultats d’un essai influe sur la perception de l’importance de l’efficacité d’un traitement. Les résultats d’un essai rapportés sous forme de bénéfice relatif suggèrent spontanément une efficacité plus importante que les mêmes résultats rapportés sous forme de bénéfice absolu 2.

Ainsi une réduction relative du risque de 50% est plus frappante qu’une réduction du risque de 5 pour 1000 (0,5%) (de 1% à 0,5%) ou qu’un NNT de 200.

Pour ne pas se laisser abuser par ce phénomène, il est nécessaire d’analyser systématiquement le bénéfice relatif et sa traduction en bénéfice absolu pour les risques de bases couramment rencontrés avec la pathologie considérée.

3       Bénéfice faible et maladie fréquente

Les bénéfices absolus de petite taille ne sont pas forcément sans intérêt. Lorsque la maladie est très fréquente, un petit bénéfice aura pour conséquence un grand nombre d’événements évités au niveau de la population tout entière. Si l’événement prévenu est sérieux (décès), un traitement de ce type présente un intérêt en termes de santé publique.

Par exemple, environ 100 000 infarctus du myocarde surviennent chaque année en France. Une réduction de la mortalité de 1% (bénéfice supplémentaire apportée par la perfusion accélérée d’alteplase par rapport à la streptokinase) évite 1 000 décès en phase précoce.

 

4       Bibliographie

1. Schmid CH, Lau J, McIntosh MW, Cappelleri JC. An empirical study of the effect of the control rate as a predictor of treatment efficacy in meta-analysis of clinical trials. Stat Med 1998;17:1923-42.

2. McGettigan P, O'Connell D. The effect of information framing on the practice of physicians. A systematic review of the published literature. Journal of General Internal Medicine 1999;14:633-642.

 

 

 

 

 

Interprétation des essais cliniques pour la pratique médicale

www.spc.univ-lyon1.fr/polycop

Michel Cucherat

Faculté de Médecine Lyon - Laennec

Mis à jour : aout 2009